L'industrie des linons et baptistes...
Les débuts de l'industrie textile en Vermandois remontent assez loin dans l'histoire de la région.
Au Moyen Age les tisserands formaient une confrérie puissante ayant ses règlements et ses franchises.
Au XIIème siècle le tissage du lin pratiqué dans le Vermandois constitue l'une des composantes motrices du dynamisme économique. L'industrie des linons et batistes de fil fut portée par des ouvriers protestants persécutés en Hollande qui vinrent se réfugier en Picardie .
On appelait ces tisserands des "mulquiniers". Ces tisseurs travaillaient à domicile. Ils installaient leur métier dans les caves afin que l'humidité de celles ci, bénéfiques aux fils de chaîne facilite la tension des fils de lin.

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Vers 1875 cette fabrication des linons diminua pour disparaître progressivement de la région. La fabrication des batistes se perpétua, quand à elle, dans le Cambrésis voisin jusqu'au début du XXème siècle.
Les années 1760-1770 marquent une évolution économique avec l'organisation de la production textile : Des négociants parisiens traitent avec les artisans de la région. C'est le cas de Monsieur Santerre, négociant parisien, qui introduit la fabrication des gazes de soie et de fil à Fresnoy Le Grand
Photo : le tissage du lin en cave
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L'épopée du châle et du cachemire…
1798-1799 : A la suite des expéditions d'Egypte, le région connaît une relance des activités des tisseurs du Vermandois avec les productions de châles et de cachemire qui ont fait la richesse et la réputation de savoir faire des tisseurs de la région.
En effet, les Châles fabriqués dans la région de Bohain connaissent une grande renommée internationale favorisée par des négociants parisiens comme : Lupin, Dubois, Destouches, Colin, Renouard, Rey…
Photo ci-dessus :intérieur de la maison d'un tisserand à domicile |
La fabrication se fait à domicile ; Les contremaîtres sont chargés de surveiller la bonne exécution et le recollement des pièces. Ils fournissent la matière première ainsi que les notices de fabrication.
Photo ci-contre : tisserands rapportant leur ouvrage terminé |
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En 1896 : 28000 emplois liés au textile du Vermandois étaient recensés dans l'Aisne.
Et c'est sans compter les innombrables épouses, grand mères et autres enfants qui travaillaient pour aider le tisseur façonnier à domicile.
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Photos ci-dessus : La vie de famille s'organise autour du métier |
Une succession de perfectionnements…
La trame de l'histoire textile du Vermandois est rythmée dès le début du XIX siècle par une succession de perfectionnement techniques qui introduisent les premiers éléments de mécanisation dans un travail jusqu'alors manuel.
En 1725 :c'est à Basile Bouchon, ouvrier Parmentier que l'on doit la première aiguille dite Jacquard et le dessin lu sur papier sans fin au moyen de trous percés.
De 1728 à 1734 : Falcon perfectionne ce métier par l'invention des griffes et des crochets. Le dessin est alors lu sur des bandes de cartons percées et enlacées comme aujourd'hui.
En 1744 : Vaucanson adjoint à ces systèmes un cylindre rond. Il a fourni à Jacquard l'idée même de son système.
En 1804 : Joseph Marie Jacquard, mécanicien né à Lyon en 1752, applique la carton de Falcon à la machine de Vaucanson et y substitue le "cylindre carré"
Cette machine sera encore perfectionnée par Breton de 1812 à 1814.
C'est aussi à Jacquard que l'on doit l'invention du piquage mécanique des cartons qui auparavant se faisait à l'emporte pièce au trou par trou.
"L'idéal du travail paisible et moral..."
Monsieur Fontaine écrivait en janvier 1922 : "le tissage à bras est l'idéal du travail paisible et moral, le tisserand chez lui, mène une vie heureuse, et dans un métier, qui l'intéresse il est libre de disposer de son temps réglant à sa guise son travail et ses heures de repos ; la loi des huit heurs est inopérante ; j'ai constaté maintes fois que lorsque l'ouvrier allait fumer sa pipe au jardin , sa femme quittait son rouet à, faire les trames et remplaçait momentanément son mari sur le métier à tisser " et définissait le tisseur à domicile picard comme " intelligent, curieux, s'adaptant facilement à cette innovation dans son métier. Il a été de tout temps un auxiliaire précieux de l'industriel à la recherche de nouveautés et transformation ou d'amélioration de tous les divers tissus qui étaient la base, le fond de sa vente."
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ci-dessus : Tisserand vérifiant ses navettes qui vont faire leur incessantes allées et venues à travers la chaîne |
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ci-dessus : tisseur effectuant un lainage damassé broché ci-contre : tisseur effectuant un plumetis |
La création de la société industrielle de Saint Quentin et de l'Aisne
La société industrielle de Saint Quentin et de l'Aisne fut créée en 1868 sous l'impulsion de monsieur Hugues Cauvin. Elle débuta par la création de cours du soir théorique et pratique du tissage qui avaient lieu dans les usines de la localité et dans les locaux prêtés par la ville de Saint-Quentin.
Progressivement furent ouverts :
- un cours théorique et pratique de tissage
- un cours de broderie pour hommes ( ouvriers et dessinateurs)
- un cours de lingerie par un ingénieur chimiste
- un cours de sciences mécaniques par des professeurs de lycée
- un cours de langues vivantes.
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Ecole de tissage : salle des métiers mécaniques |
Ecole de tissage : salle des métiers à bras |
En 1873, la société industrielle créa une annexe à Bohain, centre industriel important, et organisa des cours de tissage théorique et pratique, cours de dessin et mise en carte pour tissus.
La Première Guerre Mondiale frappa l'économie textile du Vermandois.
L' occupation allemande à Fresnoy le Grand entraîna pillages, destructions d'entreprises et destruction des métiers à bras chez l'habitant. L'objectif étant de détruire les éléments de production de l'industrie française.
Après la guerre une partie de la population en exode rejoint son lieu d'habitation et tente de reconstituer l'outil de travail traditionnel.
Pour cela elle obtiendra de l'aide du Comptoir Central d'Achat et de l'Office de Reconstitution . Ils permettront de reconstruire et d'offrir à moindre coût les métiers à bras, outil indispensable à la reprise de l'activité textile.
En 1921 : 1500 métiers à bras fonctionnent de nouveau.